LEED v4 : Savoir aborder les changements

LEED v4 : Savoir aborder les changements

Le 31 octobre prochain sera la date limite pour inscrire un projet LEED en version 2009. Après cette date, c’est la v4 qui entrera en vigueur. Est-ce que celle-ci viendra bouleverser l’industrie du bâtiment durable? Un peu certainement, mais à quel niveau et à quel prix ? Est-ce que le Québec est prêt?

Étude de cas comparative :

BuidlingGreen, Inc. a récemment publié « The Cost of LEED v4 », une étude de cas qui présente l’expérience d’un projet réel LEED 2009 soumis au test de la certification LEED v4. Dans le contexte du chevauchement LEED 2009 et de LEED v4, les conclusions que nous en avons tirées vous aideront peut-être à choisir la version sous laquelle enregistrer vos projets pour les prochaines semaines à venir.

Dans un premier temps, le bâtiment étudié était une construction neuve à vocation commerciale, plus précisément, une clinique médicale de quatre étages, d’une superficie totale de 47 777 pi2, construite en mars 2013 dans l’état du Massachusetts. Le prix total pour l’ensemble du projet était évalué à 16,4 M$, soit 343,25$/pi2. Le projet avait atteint la certification Or avec 67 points de récoltés.

Le tableau suivant montre un comparatif global des crédits atteints pour chacune des deux versions sans modification du projet :

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Pour ce même projet, le bâtiment soumis à la certification LEED v4 n’obtiendrait pas le nombre de points nécessaires afin de conserver l’Or. Il serait toutefois éligible à la certification Argent, ce qui n’est pas un mauvais résultat en soi!

L’exercice a par la suite été porté à un autre niveau ; quels éléments auraient pu être ajoutés afin de conserver une certification Or en utilisant LEED v4 et à quel prix ? Dans le tableau suivant, les mesures additionnelles sont présentées à titre d’exemple uniquement, d’autres mesures auraient tout aussi bien pu être utilisées. De plus, les prix indiqués ont été estimés par les auteurs de l’étude « The Cost of LEED v4 » et pourraient être revus et adaptés au marché québécois.

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Au total, des coûts additionnels de 9 000 $ seraient à prévoir pour obtenir les conditions préalables et 78 400 $ pour les mesures additionnelles permettant de conserver la certification Or. Les additions apportées représentent donc 0,5 % du coût total du projet, ce qui n’est tout de même pas négligeable.

Les nouveautés marquantes de LEED v4

Nouveaux secteurs du marché :
Le système d’évaluation LEED v4 s’appliquera à des types de projets plus variés. LEED v4 tiendra compte d’adaptations pour 21 différents secteurs du marché, y compris les centres de données, les entrepôts et les centres de distribution, les bâtiments hôteliers, les écoles, les commerces et les habitations de moyenne hauteur.

Contrer l’écoblanchiment ou le « greenwashing » :
Dans les versions précédentes, il était possible de se concentrer sur les crédits faciles et peu coûteux tout en ignorant les crédits ayant plus d’impacts, mais plus difficiles à obtenir. Peu à peu, LEED a eu la réputation de tolérer le « greenwashing » : les projets qui prétendent être verts alors qu’en réalité, ne font que le minimum pour obtenir la certification LEED.

Afin de contrer cette tendance, le U.S. Green Building Council (USGBC) introduira de nouveaux préalables (12 vs 8) tels que le comptage de l’eau et la mesure de l’énergie à l’échelle du bâtiment. LEED v4 sera axé sur le rendement et la performance en y intégrant des mesures de validation de la performance réelle du bâtiment. On y observera, entre autres, une évolution en matière de consommation d’eau et d’énergie.

La transparence des matériaux :
L’un des grands changements de LEED v4 sera sans contredit la façon d’évaluer la performance environnementale des produits de construction et des bâtiments dans leur ensemble. On y intégrera l’analyse du cycle de vie. Plus particulièrement, la déclaration environnementale de produits (DEP) qui deviendra un incontournable du secteur. Il s’agit d’une fiche qui synthétise la performance environnementale d’un produit (similaire à une fiche nutritionnelle dans le secteur agroalimentaire) et qui est basée sur les résultats du cycle de vie. Le cycle de vie du bâtiment peut ainsi être analysé avec l’intention d’encourager la réutilisation de matériaux et la réduction de leurs impacts sur l’environnement.

Aménagement écologique du site :
La catégorie Aménagement écologique du site sera scindée en deux, permettant ainsi de diviser les critères d’aménagement du site de ceux liés à la sélection de celui-ci. Emplacement et transport, une nouvelle catégorie, tiendra compte par exemple, de l’accessibilité aux pistes cyclables et l’intégration de bâtiments patrimoniaux.

Gestion efficace de l’eau :
L’installation de compteurs d’eau à l’échelle du bâtiment comme condition préalable est certainement l’une des nouveautés les plus marquantes de la catégorie Gestion efficace de l’eau.

De plus, un crédit sur la consommation d’eau des tours de refroidissement fera son apparition. Ce dernier aura pour objectif de limiter l’utilisation d’eau d’appoint des tours de refroidissement tout en limitant la formation de microbes, de corrosion et de tartre dans le circuit d’eau de refroidissement de condenseur.

Énergie et atmosphère :
Des points spécifiques seront accordés pour le suivi de la performance énergétique du bâtiment et la mise en service améliorée incluant l’enveloppe.

L’implantation d’un programme d’intervention en fonction de la demande sera également une nouveauté intéressante de LEED v4. Afin d’obtenir ce crédit, le projet devra être en mesure de démontrer une réduction de 10 % de la puissance appelée lors des périodes de pointes.

Enregistrement des projets :
Les projets pourront dorénavant être inscrits et coordonnés en ligne via une nouvelle plateforme web, exploitée par le Green Building Certification Institue (GBCI).

Cependant, il est important de noter qu’il n’y aura pas de version canadienne pour LEED v4. Toute la gestion se fera à partir des États-Unis, via le GBCI. Le Conseil du bâtiment durable du Canada prévoit toutefois offrir des options canadiennes pour démontrer la conformité, appelées « voies de conformité alternative » (VCA). Par exemple, s’il existe une norme de référence canadienne équivalente à une norme donnée, la VCA permettra de l’utiliser aux fins de la conformité.

En réponse aux inquiétudes qui circulent présentement dans l’industrie, je suis d’accord avec plusieurs de mes collègues pour dire qu’il sera tout à fait possible d’obtenir la certification LEED v4 et ce, grâce à un choix judicieux des crédits à atteindre. Le génie-conseil québécois détient les ressources et les connaissances pour ce faire. Êtes-vous prêts pour innover?

À propos de l’auteure :

Ann-Judith Bélanger, ing., PA LEED BD+C, est une jeune ingénieure de 4 ans d’expérience spécialisée en efficacité énergétique, œuvrant au sein de la firme de génie-conseil Bouthillette Parizeau. Passionnée par le développement durable, elle est à l’affût des dernières technologies afin de toujours proposer la meilleure solution rentable au client.

Photo de couverture : Centre de transport Stinson de la Société de transport de Montréal, lauréat du prix Bâtiment Mécanique – Électrique aux Grands Prix du génie-conseil québécois 2015, et le premier centre de transport LEED Or au Québec.

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