Affaires publiques
28 novembre 2019
Cette semaine, j’ai eu l’occasion de faire une présentation lors de la 30e édition de la Superconférence sur la construction, en compagnie de Lyne Parent, directrice générale de l’Association des Architectes en pratique privée du Québec (AAPPQ).
Nous avons présenté les résultats de l’étude de MCE Conseils sur l’impact du prix dans les appels d’offres publics, commandée par l’AAPPQ et l’AFG. Depuis la première présentation de cette étude économique au printemps dernier, nous avons ajouté des données supplémentaires pertinentes pour saisir les impacts du prix dans la sélection des professionnels et la viabilité de solutions potentielles.
À la fin de notre conférence, la période de questions a donné lieu à des échanges très intéressants avec les participants.
Entre autres, nous avons encore une fois constaté que les préoccupations des gens de l’industrie de la construction rejoignent les nôtres : un meilleur accès aux marchés publics, des approches qui favorisent l’innovation, une meilleure collaboration entre tous les intervenants, etc.
L’erreur actuellement est d’adopter une approche en silo : on voudrait le plus bas prix pour les services professionnels et le plus bas prix pour la construction, tout en espérant avoir un bon niveau de rendement d’une infrastructure…
Depuis 2002, avec l’adoption du projet de loi 106, l’expérience dans le domaine municipal a pourtant démontré que les formules axées sur le prix pour la sélection des professionnels ne fonctionnent pas. La supposée formule « qualité-prix » municipale, qui mène à l’octroi quasi-systématique au plus bas soumissionnaire, a entraîné une baisse du niveau de service, des insatisfactions, des différends, des litiges, et le désintéressement ou même l’abandon de ce marché par des firmes.
Dernièrement, le dirigeant d’une firme qui n’était pas active dans le marché municipal et qui s’est laissé convaincre de réaliser un mandat m’a rapporté que le manque de planification, les retards, l’ingénierie à faible valeur ajoutée et des employés malheureux ont convaincu l’équipe de direction de ne plus toucher aux contrats municipaux.
Dans le contexte de surchauffe actuelle, avec des investissements de plusieurs dizaines de milliards annoncés pour de nombreuses années encore, ce n’est pas une bonne nouvelle. Et ce qui est certain, c’est que pour les services professionnels, la méthode du plus bas soumissionnaire et ses équivalents basés sur le plus bas prix ne sont pas la solution pour intéresser des fournisseurs et réaliser des projets de qualité et durables.
Sur ce sujet, nous avons évidemment aussi été questionnés sur l’avancement des travaux avec le Secrétariat du Conseil du trésor afin d’identifier les meilleures pratiques en matière d’octroi de contrats de services professionnels (consultez notre dossier spécial pour en savoir plus).
Nous n’avons cependant rien de nouveau dans ce dossier pour le moment. Nous espérons toujours que le gouvernement réalise l’importance fondamentale d’une conception de qualité pour assurer la qualité et la durabilité de nos infrastructures, ainsi que le meilleur coût de possession sur le cycle de vie d’un ouvrage.
Clauses abusives
Parmi les autres conférences au programme de la Superconférence sur la construction, deux membres de l’AFG, Kathy Trahan, vice-présidente, Affaires juridiques de SNC-Lavalin et Ricardo Hrtschan, directeur, Affaires juridiques de GBi, ont fait une présentation sur les clauses « abusives » ou « excessives » dans les contrats publics.
Leur présentation a permis de constater que certaines clauses abusives se répètent de contrat en contrat. Ils ont présenté des clauses qui ont fait l’objet de litige devant les tribunaux et ont finalement été déclarées abusives, alors que d’autres non.
Ils avaient aussi relevé certaines clauses qui n’ont pas encore fait l’objet d’un jugement, mais qui laissent croire à des clauses abusives, comme celle-ci : « L’adjudicataire aura le mandat de prendre en charge les projets jusqu’à concurrence des honoraires prévus à son contrat, sans aucune obligation de la part de la Ville de verser la totalité de ces montants ».
Cette clause pourrait certainement être contestée devant les tribunaux.
Ceci dit, la meilleure option demeure encore le dialogue avec les donneurs d’ouvrage, lorsque cela est possible. Dans le cas de clauses jugées abusives, les soumissionnaires ont une responsabilité de s’informer et ensuite de poser des questions et de proposer des modifications.
Les donneurs d’ouvrage peuvent se montrer réceptifs lorsque les questions sur une clause abusive sont soutenues par de bons arguments pour expliquer les impacts négatifs sur le projet. L’AFG effectue d’ailleurs ce genre de démarche sur une base régulière au nom de ses membres.
Sinon, les fournisseurs peuvent aussi porter plainte à l’Autorité des marchés publics (AMP) et en dernier recours, s’adresser aux tribunaux.
Photo de couverture : Kathy Trahan, vice-présidente, Affaires juridiques de SNC-Lavalin et Ricardo Hrtschan, directeur, Affaires juridiques de GBi