Meilleures pratiques
14 Décembre 2021
L’AFG a invité les responsables des comités du Forum Géoenvironnement 2021 à revenir sur les thèmes qui ont été discutés lors de l’événement. Voici donc un billet signé par Manon Fortin, Directrice – Caractérisation et réhabilitation environnementale chez FNX-INNOV, membre du comité sur la « Gestion du risque associé au remblai dans le cadre d’une évaluation environnementale de site – Phase I ».
Le marché immobilier québécois connaît depuis quelques années un essor fulgurant dans toutes les régions du Québec et le développement immobilier est aujourd’hui synonyme de densification plutôt que d’étalement.
Dans cette perspective, les projets de redéveloppement immobilier imposent une attention particulière à la qualité et à l’origine du remblai urbain, c’est-à-dire les matériaux utilisés pour combler une excavation ou remonter le niveau du sol lors de la construction d’un ouvrage ou de l’aménagement d’un terrain.
Après certaines révélations concernant la disposition illégale de certains sols, et avec l’adoption du nouveau Règlement concernant la traçabilité des sols contaminés excavés, l’enjeu lié à la nature, la qualité et l’origine des remblais se doit de prendre une place prépondérante. Encore aujourd’hui, le risque associé au remblai est souvent minimisé ou pire, ignoré. Et ce, malgré le fait que le remblai puisse constituer, en cas de problème, un des plus grands enjeux financiers lors d’une transaction immobilière ou d’un projet.
Une des premières actions à prendre serait d’adopter une définition officielle claire du « remblai », curieusement inexistante pour le moment. De concert avec les représentants de l’industrie, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) pourrait donc viser dans un premier temps de normaliser la définition de « remblai » dans les documents officiels d’usage et ainsi permettre une compréhension commune par tous les intervenants.
Ensuite, un des enjeux majeurs pour les professionnels sur le terrain est relié à la présence relativement fréquente de remblais « hétérogènes ». Ces derniers sont constitués d’un pourcentage variable de sols et de matières résiduelles. En fait, la composition de certains sols est tellement variée qu’il devient difficile de les « caractériser », c’est-à-dire de les classer, à l’aide d’échantillons prélevés sur le site, en fonction de leur composition et de leur niveau de contamination, afin qu’ils soient utilisés et/ou traités adéquatement.
Selon les conclusions tirées du Forum Géoenvironnement 2021, la solution à ce problème et à d’autres questions similaires résiderait dans un meilleur encadrement de la caractérisation des sols et à la publication de directives plus claires à suivre pour toutes les étapes de la caractérisation environnementale de site, incluant la phase I.
Idéalement, le MELCC pourrait intégrer les notions pertinentes dans une prochaine version du Guide de caractérisation de terrains. Mais entre-temps, une fiche technique pourrait préciser les bonnes pratiques à mettre en place.
Par exemple, selon les membres de notre comité qui ont analysé le sujet en profondeur, dès que nous sommes en présence de remblai et que son origine et/ou sa qualité environnementale est inconnue, il faudrait de facto procéder à une caractérisation environnementale.
Lors du Forum Géoenvironnement 2021, un logigramme a été proposé par les membres de notre comité et pourrait servir de point de départ à l’élaboration d’un outil d’aide à la décision par le Ministère.
En parallèle au travail que pourrait réaliser le MELCC, des démarches ont été entamées par le Comité Géoenvironnement de l’AFG pour examiner la possibilité de créer une norme BNQ sur les types de remblais et leur caractérisation, incluant les méthodes d’échantillonnage et les paramètres d’analyse chimique. Il s’agit toutefois d’un projet à plus long terme et encore à l’étape d’analyse. À suivre…
À propos de l’auteure : Manon Fortin est ingénieure géologue, diplômée de l’Université Laval. En plus d’être Directrice – Caractérisation et Réhabilitation environnementales au sein de l’entreprise FNX-INNOV, elle est évaluatrice environnementale de sites agréée, reconnue par l’AQVE (EESA®) et inscrite sur la liste des experts du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Au cours de sa carrière, Manon Fortin a supervisé plusieurs centaines d’évaluations environnementales de sites, de caractérisations environnementales, de réhabilitations et restaurations de sites, de rédactions de plans et devis de réhabilitation. Elle dirige une équipe de plusieurs professionnels à la grandeur du Québec, en relation avec des problématiques de terrains contaminés.
Photo de couverture : FNX-INNOV, Étude phase I, région de Québec