Meilleures pratiques
12 Décembre 2023
Face à la lutte contre les changements climatiques et pour atteindre ses cibles environnementales, le gouvernement du Québec a adopté le Plan pour une économie verte 2030 (PEV 2030), qui priorise l’électrification de l’économie québécoise. L’objectif de ce plan est de contribuer à l’atteinte de la cible de réduction de 37,5 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur niveau de 1990. L’objectif est d’atteindre ensuite la carboneutralité à l’horizon 2050.
Les bâtiments résidentiels, commerciaux et institutionnels du Québec sont responsables de près de 10 % des émissions de GES de la province (Inventaire québécois des émissions de gaz à effet de serre 2020).
Les bâtiments utilisent principalement l’électricité et le gaz naturel (d’origine fossile) pour combler leurs besoins énergétiques.
Pour participer aux efforts de réduction des émissions de GES, une électrification intelligente des bâtiments est de mise. En effet, la conversion totale des besoins énergétiques des bâtiments vers l’électricité peut s’avérer contreproductive sans une approche responsable et réfléchie. Il est donc important de considérer les enjeux liés à la disponibilité de l’électricité au Québec, aux coûts énergétiques et à la résilience des bâtiments en cas de panne de courant.
L’électricité propre du Québec ne doit pas être gaspillée. L’électrification d’un bâtiment doit donc être réfléchie. Par exemple, il serait irresponsable de simplement remplacer la chaudière au gaz d’un bâtiment inefficace par une chaudière électrique afin de combler tout son chauffage. Tout comme pour la réduction des déchets, l’électrification des bâtiments devrait suivre l’approche des « 3R » : Réduction des besoins, Récupération de l’énergie et utilisation de l’énergie Renouvelable.
D’abord, la réduction des besoins consiste à adopter des mesures d’efficacité énergétique, comme l’utilisation d’éclairage à diodes électroluminescentes (DEL) avec détecteur d’occupation, l’amélioration de l’isolation thermique, l’installation de pompes et de ventilateurs à débit variable, etc. Les bâtiments du Québec sont remplis d’exemples d’enveloppes déficientes, de ventilateurs qui fonctionnent en continu à vitesse constante et d’éclairage allumé en tout temps. L’énergie la plus propre demeurera toujours celle qu’on ne consomme pas.
Ensuite, la récupération de l’énergie consiste à réutiliser la chaleur disponible produite par des équipements ou des procédés. Il est donc ingénieux d’utiliser de l’électricité pour alimenter un refroidisseur récupératif, une roue thermique ou un système permettant la valorisation du rejet de chaleur d’un autre bâtiment.
Finalement, l’utilisation de l’énergie renouvelable et peu émettrice de GES est essentielle pour combler les besoins restants. On parle ici de pompes à chaleur (aérothermie, géothermie et hydrothermie) pour le chauffage et la climatisation, d’énergie solaire thermique pour chauffer l’eau ou l’air, de gaz naturel renouvelable, de biomasse et d’électricité propre (solaire photovoltaïque, éolien, etc.). Le chauffage électrique résistif devrait seulement être utilisé en dernier choix.
La décarbonation des bâtiments emprunte en grande partie la voie de l’électrification des besoins énergétiques. Tirer profit du réseau électrique décarboné d’Hydro-Québec, en priorisant des équipements à haut rendement, est essentiel aux efforts climatiques. Il faut cependant aborder cette occasion avec une approche globale. Le chauffage électrique des bâtiments exerce une grande pression sur le réseau d’Hydro-Québec en période de pointe. Une approche qui suit le principe des « 3R » éviterait à Hydro-Québec un surdimensionnement de son réseau pour quelques heures de pointe en hiver, lequel serait coûteux et ferait augmenter les tarifs.
Quand Hydro-Québec ne peut suffire à la demande, elle doit s’approvisionner sur les marchés voisins ayant un réseau électrique de sources fossiles. Sur le plan environnemental, il peut être plus polluant d’alimenter une chaudière électrique en période de pointe que de simplement brûler le combustible, en raison de l’importation d’électricité plus émettrice. De plus, les marchés voisins entreprennent également des efforts de décarbonation par l’électrification. Cela accroîtra leur demande en puissance électrique et restreindra ainsi la capacité d’approvisionnement d’Hydro‑Québec dans ces régions.
Ensuite, les pompes à chaleur d’aérothermie font partie de l’ensemble des solutions. Il faut cependant demeurer stratégique dans leur implantation. Ces équipements de chauffage arrêtent de fonctionner en période de grand froid. Si une chaudière électrique prend le relais pour combler 100 % de la demande de chauffage, cela surchargera le réseau déjà sollicité. Les équipes de génie-conseil en efficacité énergétique sont outillées pour développer la solution optimale au meilleur coût économique et environnemental.
L’épisode de verglas d’avril 2023 soulève la question de la résilience des bâtiments et de notre dépendance à des sources d’énergie fiables. En effet, il faut garantir une résilience aux bâtiments qualifiés de services essentiels, alors que d’autres bâtiments peuvent tolérer des pannes. Il ne faut pas être dogmatique, car il n’existe pas de solution unique qui s’applique à tous les bâtiments. Les ingénieur(e)s-conseils peuvent identifier des solutions qui permettent une mitigation des impacts causés par les pannes de courant. Parmi celles-ci, il y a les solutions de stockage thermique et électrique (batteries), les solutions de biénergie (chaudière au combustible) et les génératrices. Il est recommandé d’utiliser des combustibles renouvelables (gaz naturel renouvelable et biomasse) et, en dernier recours, des combustibles fossiles. Ces équipements utilisés lors des pannes sont les mêmes qui devraient intervenir pour le chauffage durant les pointes du réseau d’Hydro-Québec.
Pour participer aux efforts de décarbonation du Québec, une électrification responsable des bâtiments est nécessaire en suivant l’approche des « 3R ». Il faut éviter tout gaspillage et valoriser notre électricité de façon responsable. Une fois les pertes évidentes évitées, l’électricité doit être utilisée efficacement (pompe à chaleur et récupération) ou pour remplacer des procédés. C’est dans cette optique que les équipes de génie-conseil spécialisées en efficacité énergétique et en développement durable doivent identifier le meilleur scénario de décarbonation d’un bâtiment. La solution d’électrification du chauffage doit finalement éviter de surcharger le réseau électrique durant les pointes, tout en considérant les besoins de fonctionnement en cas d’urgence. Cette approche intelligente contribuera également à l’électrification des autres secteurs de l’économie, comme l’électrification des transports et des industries, tout en demeurant responsable vis-à-vis de la résilience des bâtiments!
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