Meilleures pratiques
9 mars 2016
Un collaborateur à l’AFG m’a récemment transmis un texte publié il y a quelques années par l’American Institute of Architects, et signé par un architecte américain dénommé Dale Munhall. Je reprends dans ce billet l’essentiel de son message, qui demeure tout à fait pertinent dans le contexte actuel au Québec…
Mettons cartes sur table : tous les projets, ou presque, donnent lieu à des modifications en ce qui a trait à l’envergure des travaux, au calendrier d’exécution ou aux coûts. La question qui se pose souvent est de savoir qui entre le donneur d’ouvrage ou le consultant devrait payer pour ces modifications.
La réponse à cette éternelle question est tout simplement : ça dépend! Cela dépend, entres autres, des circonstances, des attentes et du partage des risques convenu entre les deux parties.
Dans tout projet, l’ingénieur doit notamment faire preuve de compétence, respecter les normes en vigueur et réaliser son mandat selon les règles de l’art. Il est néanmoins important de comprendre que ce devoir ne signifie pas que les plans, devis et autres documents d’ingénierie doivent être « parfaits ».
Un simple malentendu entre le donneur d’ouvrage et le consultant sur cette notion peut avoir des conséquences néfastes sur le succès du projet, d’où l’importance de prendre le temps, au moment de la négociation du contrat, de bien clarifier les attentes ou toute autre préoccupation sur le projet à venir. Cela paraît évident, mais malheureusement ce n’est pas une pratique courante et rares sont les consultants qui le font au début du mandat. Entre autres, même si les qualités de la firme sont indéniables, certains consultants peuvent être mal à l’aise d’aborder des préoccupations ou des défis, aussi réels soient-ils, avec un nouveau client au tout début d’un mandat.
Tout comme la pratique de la médecine, du droit ou de la comptabilité, les services professionnels en ingénierie sont soumis à des limites humaines qui font en sorte que la planification d’un ouvrage ne peut être parfaite à 100 % avant la construction. Étant donné qu’un ouvrage d’ingénierie n’est pas un produit manufacturé qui a fait l’objet de plusieurs améliorations et perfectionnements avant son entrée sur le marché, des ajustements sont très souvent requis en cours de projet.
Reste à savoir quel est le niveau « d’imperfection » qui peut être considéré comme raisonnable. Les plans et devis devraient-ils être exacts à 90 %? À 98 %? Encore une fois, cela dépend de plusieurs facteurs, notamment une définition précise des besoins et des livrables de la part du client (il est difficile de répondre adéquatement à un besoin qui n’est pas clairement exprimé), et de la complexité du projet.
Cela veut-il dire que l’ingénieur n’est jamais responsable pour des erreurs. Non, bien au contraire! Il a même l’obligation d’informer le plus tôt possible son client de toute erreur préjudiciable et difficilement réparable qu’il a commise dans l’exécution de son mandat (Code de déontologie, article 3.02.05). Il faut aussi se rappeler que si des dommages sont causés au client, l’assurance responsabilité professionnelle couvre la responsabilité juridique de l’assuré découlant de ses propres erreurs, omissions ou actes de négligence lorsqu’il rend des services professionnels.
La différence principale entre une erreur et une omission est que pour une omission, le client en retire généralement un bénéfice lorsqu’un élément qui était omis est finalement ajouté au projet. Par définition, le client ne peut pas payer pour quelque chose qui n’était pas inclus dans les travaux. Il est cependant tout à fait normal que si cet élément s’avère nécessaire, il soit ajouté au projet et que ce dernier en assume les frais.
L’une des façons de briser le tabou des erreurs et omissions serait pour le donneur d’ouvrage et le consultant de discuter des défis liés à un projet, et surtout de s’entendre sur les responsabilités et les attentes de chacun au tout début d’un mandat. La capacité de s’entendre sur les coûts rattachés aux changements qui peuvent avoir lieu déterminera en grande partie la réussite d’un projet.