Affaires publiques
14 août 2019
L’année dernière, un projet de règlement avait proposé d’introduire des formules d’octroi de contrats favorisant la sélection du plus bas soumissionnaire pour les services professionnels d’architecture et d’ingénierie.
Ce projet de règlement avait soulevé une forte opposition de la part d’experts et d’organisations dans plusieurs milieux.
Devant cette réaction, le ministre responsable à ce moment, Robert Poëti, avait retiré le projet de règlement et mandaté un comité du Secrétariat du Conseil du trésor pour rechercher les meilleures pratiques.
Ce comité, auquel j’ai participé, a mené ses travaux rondement durant les premiers mois, mais n’a tenu aucune rencontre depuis décembre 2018.
En avril dernier, nous avons dévoilé les résultats d’une étude d’experts indépendants, réalisée par la firme MCE Conseils, qui a démontré que tous les nouveaux modes d’octroi de contrats envisagés par le gouvernement auraient effectivement pour effet de mener à la sélection du plus bas soumissionnaire.
De son côté, le gouvernement a récemment confié à une firme comptable une autre étude afin de juger de la « perception » de certains acteurs de l’industrie sur les modes d’octroi de contrats proposés dans le projet de règlement de 2018.
Nous sommes donc de retour à la case départ. Pourtant, après le retrait du projet de règlement l’année dernière, les travaux du comité chargé d’identifier les meilleures pratiques et l’étude de MCE Conseils qui démontre l’inefficacité des formules proposées, la réflexion devrait avoir progressé.
La situation devient très inquiétante. C’est la raison pour laquelle, un an après le retrait du projet de règlement, nous avons initié la publication d’une lettre ouverte, cette semaine, largement reprise dans les médias. Nous avions fait un exercice similaire l’année dernière et encore une fois, malgré la période des vacances, nous avons obtenu l’appui d’une trentaine de signataires. Le groupe est composé d’experts et de représentants d’organisations dans des domaines variés : architecture, ingénierie, milieu des affaires, milieu universitaire, gestion de projet, environnement, droit, etc.
Depuis l’année dernière, la mobilisation ne s’essouffle pas, bien au contraire. Plusieurs organisations nous ont même contacté spontanément après la publication de notre lettre afin d’ajouter leur nom à la liste des signataires ou simplement pour nous signifier leur appui.
En fait, je constate un véritable consensus en faveur d’une sélection basée sur la qualité pour les architectes et les ingénieurs.
À peu près tout le monde reconnaît l’importance d’une conception de qualité dans les projets publics : les professionnels veulent optimiser leur conception, les entrepreneurs en construction veulent soumissionner sur la base de plans et devis complets et précis, les groupes environnementaux savent que le développement durable passe par l’innovation, les milieux d’affaires connaissent les coûts rattachés à des infrastructures déficientes, les donneurs d’ouvrage veulent obtenir un service de qualité, la population subit les conséquences d’infrastructures réalisées au plus bas prix possible, etc.
Il est bon de rappeler que même la Coalition avenir Québec (CAQ) avait joint sa voix à celle de tous les opposants à la règle du plus bas soumissionnaire pour les services professionnels lors de la mobilisation de l’année dernière.
Je termine en reprenant la question posée en conclusion de notre lettre ouverte : Est-il possible, une fois pour toutes, de mettre de côté les formules qui favorisent le plus bas soumissionnaire afin d’assurer la qualité de nos infrastructures pour les générations actuelles et futures?
Aujourd’hui, nous sommes nombreux à espérer que le gouvernement se prononce en faveur de la qualité et de la durabilité dans la conception de nos infrastructures publiques.
Photo de couverture : André Rainville, PDG de l’Association des firmes de génie-conseil – Québec (AFG), en entrevue dans les médias à la suite de la publication d’une lettre ouverte sur les modes d’octroi des contrats publics d’architecture et d’ingénierie