Au pont Jacques-Cartier, le silence est d’or

Au pont Jacques-Cartier, le silence est d’or

Chaque soir, le pont Jacques-Cartier se donne en spectacle.

La nuit tombée, il s’illumine et, tel un caméléon, il module ses couleurs selon l’humeur des Montréalais ou des événements en cours. Ce joyau patrimonial à cinq voies fut ouvert à la circulation en mai 1930. Depuis les vingt dernières années, d’importants travaux de réfection sont réalisés en continu afin de préserver ce pont emblématique.

Bien que je puisse admirer sa splendeur chaque jour et chaque nuit, ce sont ses dessous qui me sont surtout familiers puisque je supervise les travaux de réfection depuis 2012.

Dans le cadre d’un programme de réfection majeure dont le coût est évalué à 96 M$ et visant à prolonger la durée de vie du pont, l’équipe d’EXP procède à d’importants travaux de renforcement de la charpente d’acier du pont dans le secteur de Montréal.

Malheureusement, les travaux de boulonnage et d’enlèvement de rivets génèrent beaucoup de nuisances sonores, et comme ils se font dans un secteur densément peuplé, avec des résidences, des condos et des commerces à seulement quelques mètres du pont, on savait qu’on se devait d’entendre les citoyens dont nous nous apprêtions à troubler la quiétude.

Déterminée à entretenir de bonnes relations avec la collectivité, la Société Ponts Jacques Cartier et Champlain (SPJCC) a créé un comité de consultation nommé Comité de bon voisinage du pont Jacques-Cartier. Lors des rencontres d’information et de consultation, les résidents et commerçants ont indiqué que le bruit constituait le principal inconvénient causé par les travaux.

Habitant moi-même Montréal, je côtoie depuis plusieurs années les résidents et les commerçants des abords du pont. Je suis sensible à leur bien-être et je voulais m’assurer d’y contribuer. En tant que chargé de projet, il était important pour moi de trouver des solutions. En collaboration avec des experts en acoustique, notre équipe a effectué des analyses pour identifier les sources précises du bruit et déterminer la direction de la propagation du bruit, pour ensuite pouvoir recommander des mesures d’atténuation.

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Ayant obtenu l’aval du client, notre équipe a donc entrepris la mise en place des mesures d’atténuation que nous avions proposées, soit l’installation d’écrans acoustiques permettant de réduire l’impact sonore des travaux de chantier, le confinement des compresseurs dans des abris faits de contreplaqués, de laine et panneaux coupeson, la construction d’un mur antibruit à proximité d’une résidence, et l’utilisation de génératrices à niveau sonore réduit.

Éliminer le bruit peut paraître simple, mais c’est un défi colossal. Les résidences et les édifices commerciaux sont situés très près du pont et les travaux de renforcement génèrent beaucoup de bruit. Je dois donc conjuguer l’ingénierie conventionnelle et une approche qui nous permet de nous assurer de respecter le climat sonore pour les citoyens. J’ai adapté le déroulement et l’envergure des travaux pour les réaliser en minimisant leur impact.

En fin de compte, la solution que nous avons proposée offre des résultats qui surpassent de beaucoup les normes de l’industrie, ce qui est tout à fait de mise pour ce projet qu’on peut qualifier d’hors-norme. Même si, sur le plan esthétique, nos barrières acoustiques ne font pas tourner les têtes, je vous assure qu’elles embellissent, comme rien d’autre ne le fait, la vie des gens qui travaillent et vivent à proximité du pont. Et ça, j’en suis très fier. Parce que parfois, ne pas être remarqué, ça vaut de l’or!

À propos de l’auteur :
Fort de ses 24 années d’expérience en génie civil, Eric Bellavance, ing., M.Sc.A., PMP occupe les fonctions de chargé de projet au sein de la firme de génie-conseil EXP. Depuis le début de sa carrière, il a travaillé sur des mandats de conception et de surveillance, particulièrement en ouvrages d’art et en infrastructures de transport et portuaires.

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